La rétention urinaire constitue un motif fréquent de consultation urologique. Elle touche environ 10% des hommes de plus de 70 ans et un pourcentage significatif mais moindre de femmes. Cette condition pathologique se caractérise par l’incapacité partielle ou totale à évacuer l’urine présente dans la vessie. Cette difficulté persiste malgré une réplétion vésicale suffisante et une sensation mictionnelle préservée. La compréhension des mécanismes physiopathologiques de la rétention urinaire constitue un enjeu majeur en pratique urologique quotidienne. Sa détection précoce permet d’intervenir avant l’apparition de complications sévères du tractus urinaire. Une prise en charge adaptée à l’étiologie sous-jacente représente la pierre angulaire d’une approche thérapeutique efficace. Ces aspects diagnostiques et thérapeutiques sont essentiels pour prévenir l’évolution vers des complications graves affectant l’ensemble de l’appareil urinaire.
Définition et mécanismes physiopathologiques
La rétention urinaire se définit cliniquement par l’impossibilité d’obtenir une vidange vésicale complète malgré des efforts mictionnels répétés. Cette situation résulte d’un déséquilibre entre la pression exercée par la contractilité détrusorienne et les résistances périuréthrales.
L’harmonie physiologique de la miction requiert une coordination neuromusculaire complexe. Ce qui implique le système nerveux central, les efférences autonomiques et les structures anatomiques locales. Cette synchronisation précise orchestre la contraction détrusorienne coordonnée avec le relâchement sphinctérien, permettant ainsi une vidange vésicale efficiente. Toute perturbation de cette synergie fonctionnelle peut compromettre l’évacuation urinaire et conduire à un résidu post-mictionnel significatif définissant l’état de rétention.
Étiologies principales
Causes obstructives
Les obstructions mécaniques représentent l’étiologie prédominante de la rétention urinaire, particulièrement dans la population masculine. L’hypertrophie bénigne prostatique constitue la cause la plus fréquente de rétention urinaire chez l’homme après la cinquantaine. Cette condition entraîne une compression progressive de l’urètre prostatique. L’augmentation volumétrique de la glande prostatique génère une élévation significative des résistances à l’écoulement urinaire, altérant ainsi la dynamique mictionnelle.
Des études épidémiologiques démontrent que près de 80 % des hommes développeront un certain degré d’hypertrophie prostatique au cours de leur vie. Parmi cette population, environ 25-30% nécessiteront une intervention thérapeutique spécifique. D’autres mécanismes obstructifs contribuent également aux tableaux de rétention urinaire. Les sténoses urétrales post-traumatiques ou inflammatoires représentent un facteur significatif d’obstruction sous-vésicale.
Certaines compressions extrinsèques, notamment les masses pelviennes et l’impaction fécale, peuvent compromettre la perméabilité des voies excrétrices inférieures.
Causes non obstructives
Les dysfonctionnements d’origine neurogène représentent un groupe étiologique majeur, particulièrement chez les sujets jeunes ou présentant des comorbidités neurologiques. Les lésions médullaires, la neuropathie diabétique avancée, ou les processus dégénératifs centraux comme la maladie de Parkinson peuvent altérer profondément les mécanismes de coordination vésico-sphinctérienne.
L’atteinte peut concerner soit l’activité contractile détrusorienne (hypocontractilité), soit le relâchement synchrone du sphincter urétral, empêchant ainsi l’évacuation vésicale efficace. Par ailleurs, de nombreux agents pharmacologiques possèdent des propriétés anticholinergiques directes ou indirectes susceptibles d’induire une rétention, notamment certains antipsychotiques, antidépresseurs tricycliques et antihistaminiques de première génération.
Tableau clinique et manifestations
La présentation clinique varie considérablement selon le mode d’installation et l’étiologie sous-jacente. La rétention aiguë se manifeste typiquement par une douleur sus-pubienne intense, une sensation de tension abdominale basse, et une incapacité complète à initier la miction malgré des tentatives répétées. Cette urgence urologique s’accompagne fréquemment d’une anxiété marquée et d’une agitation psychomotrice reflétant l’inconfort majeur ressenti par le patient.
L’hypertrophie bénigne prostatique constitue la cause la plus fréquente de rétention urinaire chez l’homme après la cinquantaine. Cette condition entraîne une compression progressive de l’urètre prostatique. L’augmentation volumétrique de la glande prostatique génère une élévation des résistances à l’écoulement urinaire. Des études épidémiologiques démontrent que près de 80% des hommes développeront un certain degré d’hypertrophie prostatique au cours de leur vie. Parmi cette population, environ 25-30% nécessiteront une intervention thérapeutique spécifique.
D’autres mécanismes obstructifs contribuent également aux tableaux de rétention urinaire.
Les sténoses urétrales post-traumatiques ou inflammatoires représentent un facteur significatif d’obstruction sous-vésicale.
Certaines compressions extrinsèques, notamment les masses pelviennes et l’impaction fécale, peuvent compromettre la perméabilité des voies excrétrices. L’examen clinique révèle précisément une vessie palpable en région suspubienne, parfois jusqu’à l’ombilic dans les formes sévères négligées.
Approche diagnostique systématisée
L’évaluation diagnostique initiale repose sur un interrogatoire détaillé explorant les antécédents urologiques, neurologiques et chirurgicaux pertinents, ainsi que l’inventaire exhaustif des thérapeutiques médicamenteuses actuelles. L’analyse sémiologique précise des symptômes du bas appareil urinaire (SBAU) permet d’orienter le raisonnement clinique vers les mécanismes physiopathologiques prépondérants.
L’examen physique comprend l’évaluation de la distension vésicale par palpation et percussion abdominale. L’inspection des organes génitaux externes fait partie intégrante de l’examen initial. Un examen neurologique succinct des métamères sacrés permet d’évaluer l’intégrité des voies neurologiques impliquées. Chez l’homme, le toucher rectal apporte des informations cruciales sur le volume prostatique. Cet examen renseigne également sur la consistance prostatique et la présence éventuelle de nodules suspects. La confirmation objective du diagnostic repose principalement sur la mesure précise du volume urinaire résiduel post-mictionnel. Cette évaluation peut être réalisée soit par cathétérisme vésical évacuateur, soit par échographie vésicale non invasive. Un résidu supérieur à 100-150 ml chez l’adulte jeune confirme généralement le diagnostic de rétention.
Chez le sujet âgé, un seuil de 200-250 ml est habituellement considéré comme pathologique. Ces valeurs nécessitent des investigations complémentaires pour préciser l’étiologie sous-jacente. L’analyse urinaire cytobactériologique constitue un élément essentiel du bilan initial. Elle permet de détecter une éventuelle infection urinaire concomitante, fréquemment associée aux états de stase. En fonction du contexte clinique, des explorations fonctionnelles spécialisées peuvent être indiquées. La débitmétrie urinaire offre une évaluation objective du flux mictionnel. La cystomanométrie permet d’analyser la fonction contractile vésicale et la compliance pariétale. L’électromyographie périnéale vise à caractériser précisément les anomalies urodynamiques sous-jacentes.
Stratégies thérapeutiques adaptées
Prise en charge de la rétention aiguë
L’urgence thérapeutique consiste à décomprimer rapidement la vessie par un cathétérisme vésical, préférentiellement transurétral ou, en cas de difficulté d’accès, par voie suspubienne. Cette procédure soulage immédiatement la symptomatologie douloureuse et prévient les complications potentielles sur le haut appareil urinaire liées à l’hyperpression vésicale prolongée. La décompression doit s’effectuer progressivement pour minimiser les risques d’hématurie ex-vacuo et de déséquilibres hydroélectrolytiques brutaux.
Une fois l’urgence maîtrisée, l’approche thérapeutique sera guidée par l’identification précise du mécanisme physiopathologique prédominant et de l’étiologie sous-jacente. Les patients présentant une hypertrophie prostatique bénéficieront d’un traitement par alpha-bloquants (alfuzosine, tamsulosine) visant à relaxer les fibres musculaires lisses du col vésical et de la région prostatique, facilitant ainsi l’écoulement urinaire. Dans les formes plus évoluées, l’association avec des inhibiteurs de la 5α-réductase (finastéride, dutastéride) permet de réduire graduellement le volume prostatique par modulation hormonale.
Traitement étiologique spécifique
Les causes obstructives mécaniques nécessitent souvent une approche interventionnelle adaptée au niveau et à la nature de l’obstacle : résection endoscopique de prostate (RTUP) pour l’adénome prostatique symptomatique, photovaporisation laser pour les volumes prostatiques importants, urétrotomie interne pour les sténoses urétrales, ou chirurgie reconstructrice dans les cas complexes. Ces interventions visent à restaurer un calibre urétral fonctionnel et à réduire significativement les résistances à l’écoulement urinaire.
Pour les rétentions d’origine neurogène, la stratégie thérapeutique repose principalement sur les auto-sondages intermittents propres, permettant une vidange vésicale régulière et complète tout en préservant l’anatomie et la fonction rénale. Cette technique, initialement perçue comme contraignante, s’avère généralement bien acceptée après une éducation thérapeutique adaptée. Dans certains cas sélectionnés, la neuromodulation sacrée ou les techniques de stimulation électrique peuvent améliorer la coordination vésico-sphinctérienne et restaurer partiellement l’autonomie mictionnelle.
Prévention des complications et suivi
La rétention urinaire chronique non traitée expose à diverses complications potentiellement graves : infections urinaires récidivantes liées à la stase, formation de lithiases vésicales, dilatation progressive du haut appareil urinaire pouvant conduire à une insuffisance rénale obstructive. La prévention de ces complications repose sur un suivi régulier incluant l’évaluation périodique du résidu post-mictionnel, la surveillance de la fonction rénale et la détection précoce des signes d’infection urinaire.
L’éducation thérapeutique est un pilier essentiel de la prise en charge au long cours, particulièrement chez les patients nécessitant des auto-sondages intermittents ou présentant des facteurs de risque de récidive. Les mesures hygiéno-diététiques, incluant une hydratation adaptée et la régulation du transit intestinal, contribuent significativement à optimiser la fonction vésico-sphinctérienne et à réduire l’incidence des complications.
La rétention urinaire représente une entité clinique fréquente aux multiples étiologies, nécessitant une approche diagnostique rigoureuse et une stratégie thérapeutique personnalisée. Les avancées récentes dans les techniques mini-invasives et la compréhension des mécanismes neurophysiologiques de la miction permettent aujourd’hui d’offrir des solutions thérapeutiques innovantes pour les patients souffrant d’impossibilité d’uriner chronique ou récidivante.